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Le retour de Tocqueville
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17 mai 2006

ICE

La scène, comme elle s'est produite. Dans l'avion Air Tran du retour à Boston. Mon ami Yves commande à boire. "Je voudrais du Sprite s'il vous plaît". Le steward s'exécute, s'apprête à mettre une pelletée de glaçons -- ice en Anglais -- dans son petit gobelet de plastique transparent. "Non, merci. Sans glaçons...". "Vous n'êtes pas américain", demande le steward interrompant son geste. Yves: "Non, comment le savez-vous ?" Le steward: "Parce que les américains demandent toujours à avoir des glaçons".

Cette scène, qui n'a duré que quelques secondes, ctristallise l'une des grandes incompréhensions entre nos deux peuples: être glaçons ou ne pas l'être. J'ai remarqué l'appétence de nos amis américains pour les glaçons dès mon arrivée sur le campus de la Boston University. Lors de mon premier repas au dining hall, la machine à glaçon tournait déjà à plein régime. Les étudiants, nombreux, l'utilisaient tour à tour, dans un geste bien rodé, pour rafraîchir leur soda.

POURQUOI? Après neuf mois de séjour aux États-Unis, je n'ai toujours pas percé ce mystère. Tout juste quelques pistes. Première hypothèse: les américains auraient une affinité plus grande pour les boissons fraîches. C'est une donnée constitutive de la société américaine, inscrite dans la tradition, au même titre que le fait de mettre du beurre dans les pattes l'est pour nous. D'où l'ice tea, le très apprécié frozen coffee ou "café glacé" (que je glaconne connaissais pas avant de mettre le pied ici), le chocolat froid ou encore la gamme inépuisable de sodas, aux goûts et couleurs différentes. Le mode de consommation américain trancherait alors avec l'oriental, Proche-Orient et Asie, lequel privilégie les boissons chaudes.

ci-dessus: le glaçon, remède d'une société en surchauffe

FAST FOOD. Deuxième hyptothèse, ce goût pour les glaçons aurait été articiellement créé par... l'industrie du fast food. La restauration rapide, dans sa recherche perpétuelle de réduction des coûts, se donne un malin plaisir à masquer les faibles quantités de boisson qu'elle distribue à ses clients en ajoutant des glaçons à l'excès. Plus grand le nombre de glaçons, moins importante la quantité de boisson. Telle est l'arithmétique commerciale. Le libéralisme dans vos verres! Et toute la jeunesse suit.

MYTHE DE LA FRAÎCHEUR. Puis, il y a le mythe de la fraîcheur. En effet, le Frais jouit probablement dans l'imaginaire collectif américain d'une meilleure réputation que le Chaud, assimilé au sexe, au Sulfureux. C'est ça. La jeunesse cherche à être "cool". Un mot qui peut être utilisé pour parler d'une attitude (that's cool of you) ou d'une personne décontractée (cool guy) mais aussi pour désigner quelque chose dont on se réjouit (that's cool!). Dans la même veine, le verbe to chill, littéralement "grelôter", signifie dans le langage commun se reposer, se relaxer.

Ce riche champ lexical me conduit à penser que la société américaine vit dans une sorte de glorification de la fraîcheur, comme elle le fait pour l'alcool pour lequel on constate également un volumineux champ lexical. Peut-être à cause du climat qui fait la part belle aux étés chauds et humides, peut être à cause de son modèle économique qui place ses sujets en position de surchauffe psychologique permanente. Une société chaleureuse? Non. Une société qui aspire à la fraîcheur.

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Commentaires
H
appétence..pas mal, je n'oublierai pas ! je ne vais pas m'appesantir sur le désaipaissisement de la calote glaciaire, ni faire une crise d'appendicite sur soit disant appétissant appendice des boisons américaines : notre bien aimé cube transparent sensé appâter les papilles, là-bas.
Le retour de Tocqueville
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